« Nous savons qu'une profession qui ne se forme pas régresse. Je le dis souvent, nous avons des obligations, nous en sommes tout à fait conscients. Les professionnels et les institutions sont unanimes, nous savons qu’il faut le faire. C'est vrai qu'il y a eu des périodes quelque peu troublées avec la crise. Nous avons des obligations annuelles, des obligations triennales. Depuis un an, il est question de mettre en place des compositions administratives », a introduit Vincent Reynier, avant de questionner Florence Peybernès sur la suite des événements. Pour rappel, ces professionnels doivent effectuer 120 heures de formation au cours de 3 années consécutives. Aussi, 20 heures au moins doivent accomplies au cours d’une même année.
Les 1000 « irréductibles »
« Nous avons un peu plus de 1000 commissaires aux comptes qui détiennent au moins un mandat, qui sont dans une situation de manquements graves et répétés vis-à-vis de leur obligation de formation. Notre population cible, c’est celle-ci », a indiqué Florence Peybernès, qui est notamment chargée de veiller au respect des obligations de formation des professionnels. « Je sais que les compagnies régionales font beaucoup, que vous suivez ces CAC, que vous revenez vers eux. Il n’empêche que ces irréductibles gaulois sont 1000. Cela ne suffit pas ».
C’est pourquoi la présidente du H3C va demander une réforme du texte au directeur des Affaires civiles et du Sceau. Cette modification se fera via la voie législative, probablement lors de la transposition de la directive ESG (CSRD), en 2023. « Comme il s’agira d’un texte répressif, il ne pourra s’appliquer qu’aux faits commis après son entrée en vigueur », a ajouté Florence Peybernès, indiquant devoir donc attendre encore trois ans après la publication de la loi pour commencer à sanctionner. « Certes, ce n’est pas pour tout de suite, mais je suis une femme opiniâtre. Ce texte entrera en vigueur, parce que je vois bien que j'ai une population d’irréductibles et qu'il faut qu'on en sorte », a-t-elle souligné.
Une « usine à gaz »
« La très grande majorité des professionnels joue le jeu », a ensuite martelé Yannick Ollivier, qui s’est dit agacé par certaines communications selon lesquelles la moitié des professionnels ne se forment pas. Mais le président de la CNCC l’a reconnu, le système des CAC est une « usine à gaz ». Les différents plafonds appliqués selon les différents formats jouent parfois des « mauvais tours » aux professionnels. « Nous nous sommes aperçus que si nous déplafonnions 2 % ou 3 %, sans dénaturer la dynamique de formation, nous passerions de 57 % à 80 % de professionnels qui sont dans les clous », a-t-il expliqué. « Ce n’est pas que les professionnels ne veulent pas se former, c’est que l’on peut vite se faire piéger si l’on ne calcule pas précisément les plafonds par année avec le déplacement triennal ».
Aussi, la profession fait des propositions d’allègement, non pas de la contrainte, mais de cette mécanique, qui pénalise les professionnels « à leurs corps défendant ». Considérant que les conférences organisées aujourd’hui atteignent un niveau de plus en plus élevé, mais qu’elles ne valent pas formation, la CNCC a décidé de donner tous les moyens aux régions pour y remédier. La Compagnie a, par exemple, placé le Forum national des associations et fondations, organisé le 20 octobre prochain, en formation. Les Assises de la CNCC, prévues pour les 8 et 9 décembre prochains, deviendront également des temps de formation. La même logique sera valable pour d’autres événements de ce type. « Cela permettra à des professionnels de ne pas se retrouver au dépourvu. Parce que bien que formé, bien que s’étant déplacé et ayant consacré du temps, on se retrouve plafonné par les conférences », a déploré Yannick Ollivier.
Enfin, la CNCC souhaite développer un maximum de formations dans de nouveaux domaines où des opportunités sont à saisir. Cela peut concerner le numérique, ou encore la durabilité, domaine dans lequel il y aura un besoin de formation conséquent. « Certains confrères m’expliquent que nous dispensons toujours les mêmes formations et qu’il faudrait un peu plus de diversité », a expliqué Yannick Ollivier. « À la Compagnie, notre rôle est d’abord de tendre les mains, de donner des solutions aux confrères, de leur simplifier la vie pour leur permettre de répondre à l’obligation de formation de manière intelligente, c’est-à-dire en rapport avec leurs besoins, leur développement et leurs enjeux ».
S’il existe effectivement « quelques professionnels qui ne jouent pas le jeu », il s’agit, pour Yannick Ollivier, d’une minorité, qu’il ne faut toutefois pas « laisser sur le bas-côté ». Le président de la CNCC souhaite également continuer de rechercher les raisons de ces manquements. « On nous avait annoncé la fin du monde avec la loi Pacte. Ce n’est pas le cas. Nous avons un quasi-maintien des effectifs des professionnels, avec beaucoup de jeunes qui la rejoignent. Cette profession continue à garder des mandats, elle n’a pas tout perdu. Elle continue à exercer. Si nous voulons continuer à garder cette diversité, cette masse de 12 000 professionnels, il faut aussi les embarquer via la formation, leur permettre de développer de nouvelles missions et de nouveau mandats », a martelé Yannick Ollivier. Des formations gratuites pourraient par ailleurs être organisées en commun avec les juges consulaires.
La CNCC entend également travailler sur la problématique du coût de ces formations. Si les jeunes bénéficient d’un plan ayant rendu gratuites toutes les formations et les cotisations les trois premières années, il faut les accompagner par la suite. « Des initiatives, donc, de l’innovation. C’est ce que nous mettons en place », a conclu le président de la CNCC.