Dans un contexte de tensions inédites, avec notamment la grippe aviaire, la guerre en Ukraine, mais aussi la flambée des prix des matières premières ou encore la réglementation bio et l’ovosexage, le Comité national pour la promotion de l’œuf (CNPO) a récemment dévoilé le bilan de l’année 2022 de l’œuf, à l’école Ferrandi, à Paris. Effectuée par Yves-Marie Beaudet, Loïc Coulombel, et Maxime Chaumet, la présentation a mis en avant le côté cuisine, où « l’œuf à la cote », et le côté poulailler, où « l’œuf est sous pression ».
96,5 % des ménages ont acheté des œufs en 2022
Alors que la consommation globale des produits alimentaires se contracte, un « produit phénoménal » a échappé à la tendance et a confirmé « son statut d’incontournable dans la cuisine des Français » : l’œuf. En effet, en 2022, chaque habitant a consommé en moyenne220 œufs. Ce chiffre totalise les œufs utilisés par les consommateurs, la restauration hors domicile et les entreprises de l’agroalimentaire. D’après, le CNPO, les Français sont de plus en plus nombreux à se « laisser séduire par ce produit essentiel », ainsi au cours de l’année précédente, 96,5 % de ménages en ont acheté, une hausse de 0,5 % par rapport à 2021. Sur les deux premiers mois de l’année 2023, les ventes des œufs en grande distribution ont même augmenté de 5,9 % en volume par rapport à la même période l’année dernière.
Chute continue des œufs issus de poules élevées en cages aménagées
Selon le CNPO, la progression des ventes d’œufs en grande distribution est portée par la croissance des œufs alternatifs. Les œufs issus de poules élevées au sol enregistrent la plus forte augmentation des ventes, de 65 % sur les deux premiers mois 2023 par rapport aux mois de janvier et février 2022, suivis du plein air avec une hausse de 33,6 % et du Label Rouge de 5,4 %. Les ventes d'œufs bio, après s'être repliées de 5,8% en 2022 par rapport à 2021, semblent se stabiliser début 2023. Les œufs issus de poules élevées en cages aménagées ont, quant à eux, chuté de 33,1 %.
L’influenza aviaire inquiète les professionnels
Malgré des ventes en augmentation, et avec une hausse des prix « maîtrisée » par la filière œuf, le CNPO a lancé une alerte : « Nous vivons toujours avec cette épée de Damoclès au-dessus de la tête. Le temps est compliqué ». En effet, les professionnels font face à un repli de la production de 8 % en 2022, réduite ainsi à 14,4 milliards d’œufs, en raison notamment de l’influenza aviaire. Dans le monde, au cours de l’année précédente, plus de 60 millions de poules pondeuses ont été touchées par l’épizootie.
En 2023, la reprise est jugée « difficile ». En effet, 19 foyers ont déjà été détectés sur des élevages de poules et poulettes. La France a ainsi perdu 1,1 million de poules pondeuses et 200 000 des reproducteurs en raison de l’influenza aviaire. Ces pertes, selon le CNPO, représentent une réduction de la production de 28 millions d’œufs par mois. Les professionnels de l’œuf estiment qu’un retour à un niveau de production d’avant crise ne devrait pas intervenir avant l’automne 2023. Toutefois, l’Institut technique de l’aviculture (Itavi) a déclaré que la production d’œufs devrait progresser de 5 % en 2023 par rapport à 2022, mais rester inférieure de 4 % à la production de 2021.
Un engagement fort du Gouvernement espéré
Face à ces difficultés, le Comité national de la promotion de l’œuf et l’ensemble de la filière en appellent à un engagement fort du Gouvernement. « L’État doit accompagner les éleveurs français de poulettes et de poules pondeuses en indemnisant à 100 % leurs pertes pendant les périodes de restriction et non seulement à 90 % comme annoncé par le ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire », ont-ils déclaré. Ils réclament également « un allongement, au-delà des 150 jours annoncés, de la période d’indemnisation suivant la levée des restrictions pour cette production avec des cycles longs ». Par ailleurs, les professionnels des différentes filières avicoles espèrent que « l’accès à la vaccination sera un moyen de lutte complémentaire à ceux déjà déployés pour lutter contre l’influenza aviaire hautement pathogène ».
« Éviter une distorsion de concurrence »
Enfin, la filière française des œufs s’inquiète et se mobilise autour des futures négociations sur la révision des réglementations européennes relatives au bien-être animal et aux émissions industrielles et agricoles. Elle a ainsi rappelé que la France est notamment engagée dans un processus de transition volontaire des modes d’élevage, qui lui permet déjà de dépasser la moyenne européenne dans le domaine des élevages alternatifs à la cage aménagée et de figurer parmi les deux seuls pays au monde à avoir interdit l’élimination des poussins mâles. Dans cette optique, l’Interprofession demande « une harmonisation de la réglementation européenne pour étendre cette interdiction à l’ensemble des pays membres afin d’éviter une distorsion de concurrence accentuant les difficultés de la filière ».