Lors d’une conférence de presse, la Fédération française du bâtiment Grand Paris Île-de-France, par l’intermédiaire de son vice-président en charge de l’économie, Edouard Durier, a révélé les chiffres 2022 du bâtiment francilien et ses prévisions pour 2023. Le secteur, qui est particulièrement touché par les différentes crises actuelles, a livré ses craintes, tout en espérant voir arriver très tôt des accélérateurs d’activité.
Une chute des mises en chantier de logements neufs
Selon les estimations de la Cellule économique régionale de la construction et du bâtiment, le chiffre d’affaires 2022 du bâtiment d’Île-de-France est en hausse de 4,6% entre 2021 et 2022, pour atteindre 38 milliards d’euros. Cependant, les trois grands marchés du secteur n’ont pas suivi la même tendance. Les mises en chantier des logements neufs ont chuté de 7,7 % par rapport à 2021, alors que les autorisations de logements ont augmenté de 8,8 %. « Ce sont les prémices d’une crise du logement neuf, qui semble se profiler en 2023, alors que la construction neuve représente près de 45 % de notre chiffre d’affaires », a indiqué Edouard Durier.
Du côté du non résidentiel, « une nette amélioration » est à noter. En effet, les autorisations de locaux se sont rapprochées des 5 millions de m2 avec une augmentation de 21,2 % par rapport à l’année précédente, et 3,5 millions de m2 ont été mis en chantier, une hausse de 4 %. Malgré ces bons résultats, il a été notifié que le taux de vacance de bureaux « n’a jamais été aussi élevé avec 7,9 % et laisse présager d’une potentielle baisse de construction non résidentiel ».
Le secteur de l’entretien-rénovation est, pour sa part, resté stable, avec une très légère hausse de 0,5 % par rapport à 2021, mais une baisse de 5,1 % en comparaison avec les chiffres de 2019. « Ce secteur est dynamique en raison de la forte pression des Pouvoirs publics, et notamment des 50 millions d’euros supplémentaires donnés en 2023 pour MaPrimeRénov’, mais nous estimons que ce n’est pas assez pour inciter à la rénovation globale », a souligné Edouard Durier. La FFB espère « un effort plus conséquent » sur ce sujet-là, sous peine de diminution importante dans les années à venir, puisque « le contexte économique et le reste à charge freinent la rénovation globale ».
Des défaillances d’entreprises en hausse
Dans les départements de la métropole du Grand Paris, les défaillances des entreprises ont subi une forte augmentation. En effet, le Val-de-Marne a connu une hausse de 60 %, tandis que les Hauts-de-Seine sont à 20 % et Paris 14 %. Seule la Seine-Saint-Denis voit les défaillances d’entreprises chuter de 3 %. Ces chiffres inquiètent la FFB, qui y est très attentive, mais craint une augmentation drastique en 2023, notamment avec le remboursement dans le courant de l’année des PGE (prêt garanti par l’État) et les problématiques de trésorerie.
A ces éléments s’ajoutent la crise des matériaux et des matières premières ainsi que celle énergétique. En effet, les niveaux de prix des matériaux sont toujours élevés et continuent d’augmenter malgré une inflexion récente sur les derniers mois. Mais, l’index des matériaux mis en place par le ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique Bruno Le Maire laisse entrevoir une certaine amélioration. « Ce dispositif devrait permettre une meilleure visibilité sur l’évolution des coûts en période de forte volatilité des prix et une meilleure anticipation », a ainsi admis le vice-président de la FFB.
En plus de cela, « les délais de livraison des matériaux sont trop longs et posent des problèmes de production », a déclaré Edouard Durier. En effet, au niveau national, plus de 12 % des entreprises de plus de 10 salariés déclarent ne plus pouvoir produire du fait des problèmes d’approvisionnement.
Plusieurs propositions pour se relancer en 2023
Pour lutter face aux crises et relancer le secteur du bâtiment en 2023, la FFB a formulé plusieurs propositions, notamment l’indexation systématique de tous les marchés, publics, comme privés, et l’application drastique du gel des pénalités de retard et la révision des prix aux marchés privés. Elle a aussi appelé à l’extension au bâtiment de l’aide exceptionnelle accordée aux PME des Travaux publics consistant en une subvention égale à 0,125 % du chiffre d’affaires réalisé en 2021, mais aussi faire de la théorie de l’imprévision, optionnelle à ce jour, une mesure d’ordre public pour les marchés privés.
L’entretien-rénovation comme locomotive de l’activité 2023
Pour 2023, la Fédération française du bâtiment continue à placer beaucoup d’espoir sur le logement, et aimerait l’introduction d’un crédit d’impôt sur les annuités d’emprunt pour adoucir le surcoût de la réglementation RE2020, qui risque de rehausser les prix du résidentiel neuf et ainsi freiner l’accès à la propriété, le développement d’offre de logements, en fixant l’objectif de construction à 70 000 en Île-de-France. La FFB désire également l’engagement d’une réflexion approfondie sur les perspectives de rapprochement des réglementations, qui seraient de nature à réduire les coûts de transformation des bureaux en logements.
Enfin, le secteur du bâtiment compte s’appuyer sur l’entretien-rénovation, comme « locomotive de l’activité en 2023 ». En France, 1,2 million de résidences principales sont des passoires énergétiques, beaucoup d’immeubles le sont aussi. « Nous devons massifier les opérations de rénovation énergétique, elles nous permettront de contrebalancer les autres pertes. Nous sommes prêts, formés et qualifiés pour relever ce défi de rénovation énergétique, afin d’accompagner les entreprises et les particuliers », a conclu Edouard Durier.