Malgré son nom anglophone, EVA (Esports Virtual Arenas) est une start-up française. Une pionnière, dans l’esport, et pas n’importe lequel. L’entreprise s’est spécialisée dans les jeux vidéo en réalité virtuelle (VR), dont les salles sont en vogue et en croissance dernièrement. Sans que la démocratisation ne soit totale, les images de joueurs munis d’un casque VR sur la tête et devant les yeux, bougeant pour éviter obstacles et adversaires, ou affublés d’un pistolet ou d’un fusil pour repousser des soldats ennemis sont de plus en plus fréquentes. C’est dans ce contexte qu’EVA a lancé une levée de fonds de près de 5 millions d’euros, afin de répandre ce type de jeu, comme l’explique son cofondateur Jean Mariotte : « Aujourd'hui, l’esport ce n'est plus une niche, c'est vraiment devenu un secteur grand public, avec des audiences qui commencent à être énormes. Il y a plus de 10 millions de fans d’esport en France. On voit qu’il y a un vrai truc qui se crée autour de l’esport, accéléré avec les confinements. ».

De la sédentarité à une dépense physique sportive
Concepteur et joueur lui-même, Jean Mariotte explique que l’esport est « un mix entre le gaming et le sport » en axant son discours sur la différence de ressenti du grand public sur le sujet. « Malgré cela, il y a encore beaucoup de gens qui disent que l’esport n'est pas un vrai sport. Le sujet principal derrière, c'est la sédentarité. Aujourd'hui, quand on joue, on est quand même derrière un ordinateur, une console, une télé, donc on fait la promotion de la sédentarité. Le loisir numéro 1 dans le monde est connecté à un problème de santé publique. »
C’est là qu’intervient l’esport en VR, et la raison d’être d’EVA. Une façon de jouer différente, moins sédentaire, qui permet aux utilisateurs de bouger tout en continuant d’explorer mondes, bunkers désaffectés ou terrains de football. « On est partis d’un rêve de gamer. On se dit que ce qui serait génial en fait, c’est d’être dans le jeu, et de pouvoir se déplacer sur un terrain de football, jouer à Call of Duty (jeu de guerre à la première personne). Le terrain de football, c’est vraiment la genèse d’EVA ».
Le futur de l’esport ?
« On est en train d’imaginer ce que pourrait être le futur de l’esport en VR, en combinant des mécaniques de jeux vidéo et une vraie dépense physique. Et ça, c’est vraiment important aujourd’hui, quand on veut vraiment évangéliser. Lors de la dernière compétition, un jeune de 14 ans participait, et son père a dit qu’il était content, car son fils ne jouait plus à Fortnite (jeu de tir en ligne, entre élimination, construction et survie, sur console ou PC). Donc voilà, peut-être qu'on va réussir à réconcilier les enfants et leurs parents grâce à ce projet. », a ajouté le fondateur.
De la sédentarité à la dépense physique, la fenêtre de tir est ouverte pour proposer quelque chose de différent aux joueurs, en plus d’une immersion totale avec la VR. « EVA, c’est avant tout une technologie qu’on a développée, qu’on a appelé l’hyper free roaming, et dans laquelle on peut se déplacer sur de très grands espaces. Il y a une cohérence parfaite entre ce que vous ressentez physiquement et ce que vous vivez virtuellement. C'est à dire qu'on ne va pas vous faire déplacer sur des plateformes. Quand vous vous déplacez, vous marchez. Le second sujet, c’est qu’on a voulu créer une expérience globale, en intégrant du jeu, mais également une zone de bar-restauration, avec retransmission de lives. L’idée, c’est de créer cet esprit esport bar, et l’intérêt, c’est que vous jouez, puis vous pouvez faire une pause. ».
Les Etats-Unis dans le viseur
La levée de fonds va donc permettre la construction de plus de salles proposant de l’esport VR, à la suite des 14 déjà implantées en France. Avec 46 salles en cours d’installation, EVA prévoit d’atteindre 100 salles sur le territoire d’ici 2025.
L'investissement de départ pour l’ouverture d’une salle EVA franchisée en France est d’environ 600 000 €. Les porteurs de projet doivent investir entre 150 et 200 mille euros, en fonction de la région, le reste étant financé par crédit bancaire.
Ce financement va aussi amener l’entreprise à accélérer son développement hors du territoire national. La conquête des États-Unis est l’autre grand objectif de la start-up, qu’elle compte réaliser en recrutant une équipe exécutive, et en gardant son avance technologique. Une première salle ouvrira ainsi à Dallas en septembre 2022, avant une cinquantaine de salles d’ici fin 2023 Outre-Atlantique. Mais aux États-Unis, l’investissement est le double de celui en France.
Dans des secteurs en pleine croissance, Jean Mariotte et ses associés veulent passer un cap. Car d’ici fin 2022, ce sont près de 13,9 millions de casques VR qui seront vendus. Des chiffres impressionnants, qui renvoient au 1,5 milliard de dollars brassés par le marché en 2021, un montant qui pourrait même approcher des 3 milliards en 2025. Une expansion importante, sur laquelle EVA pourrait bien surfer vu sa technologie avancée.
Un sac à dos, un casque VR, et les JO 2028
L’équipement du joueur se présente comme suit : un casque VR, un backpack (sac à dos) contenant « l’ordinateur » connecté permettant de jouer, et un gun connecté. De quoi pouvoir se déplacer librement dans les salles de 500 m2 prévues à cet effet. Les matches opposent des équipes de quatre joueurs, et les premières compétitions en VR ont eu lieu dernièrement, en live sur la plateforme Twitch. La VR a donc eu du succès auprès des joueurs, mais aussi des investisseurs de la levée de fonds. « Pouvoir entrer dans un jeu vidéo incarne un rêve d’enfant, qui est devenu réalité quand j’ai testé pour la première fois EVA », commente Jean-Baptiste Rudelle, business angel, co-fondateur et ancien président de Criteo.
C’est donc avec ambition et des nouveaux moyens financiers qu’EVA va continuer sa progression. « Nous avons l’ambition de créer la discipline sportive du futur grâce aux technologies immersives, et être officiellement représentés aux JO 2028 », conclut Jean Mariotte. De la VR à la réalité des Jeux olympiques, il n’y a qu’un pas. Et un casque de réalité virtuelle...