AccueilActualitéRégion Île-de-France & Grand ParisLGBT+ en entreprise : "Le droit, comme tout le monde, de parler de moi"

LGBT+ en entreprise : "Le droit, comme tout le monde, de parler de moi"

A l’occasion de la semaine de l’entreprise responsable et inclusive, le Medef a organisé une table ronde sur "l’importance des rôle LGBT+ en entreprises".
En partenariat avec L’Autre Cercle, le Medef a dernièrement organisé une table ronde intitulée "l’importance des rôles LGBT+ en entreprise".
© AP / Boris Stoykov - En partenariat avec L’Autre Cercle, le Medef a dernièrement organisé une table ronde intitulée "l’importance des rôles LGBT+ en entreprise".

ActualitéRégion Île-de-France & Grand Paris Publié le , Par Boris Stoykov et Maxime Monniotte

Une table ronde intitulée "l’importance des rôles LGBT+ en entreprise" a récemment été organisée par le Mouvement des entreprises de France (Medef), en partenariat avec l’association reconnue d’intérêt général L’Autre Cercle. Ce moment d’échanges a eu lieu à l’occasion de la Semaine de l’entreprise responsable et inclusive (Seri) mise en place par le Medef et l’Association française des managers de la diversité (Afmd).

Pour lancer cette table ronde, la porte-parole de la Fédération de L’Autre Cercle et coresponsable du pôle employeur Catherine Tripon a rappelé la signification de LGBT+ : "Lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres". Elle a ensuite introduit le sujet qui répond totalement à l’enjeu de la Seri, notamment sur l’inclusivité, soulignant une problématique :

Pour les personnes qui font leur transition, qui sont non-binaires ou fluidités du genre, la visibilité est réelle. Mais les personnes lesbiennes, gays, et bisexuelles sont souvent non-visibles pour de très mauvaises raisons, souvent parce que les conditions ne sont pas réunies et donc elles préfèrent attendre, mais cela a un impact qui est assez difficile à vivre.

"Cette violence envers les LGBT+ existe également au travail"

Un sujet comme celui-ci peut être à la marge, parce qu’il ne rentre pas dans le dialogue social, il n’est pas mesurable. Il n’est pas soumis à accord avec les partenaires sociaux, et donc n’a pas de pénalité financière.


- Catherine Tripon

Elle a poursuivi en rappelant les actions de L’Autre Cercle, qui accompagne les acteurs du management de la diversité et de l’inclusion du monde professionnel et observe la situation des personnes LGBT+ dans le monde du travail.

La porte-parole de l’association a alors dénoncé que dans les dernières enquêtes,"une grande majorité de ces personnes ne sont pas visibles", et "quau-delàdes agressions physiques dans la rue et morales sur les réseaux sociaux, cette violence envers les LGBT+ existe également au travail". Mais cela sous une forme différente : "des blagues, des moqueries ou encore une mise à l’écart, qui peut rentrer dans le dur du harcèlement, avec des comportements discriminants, ou encore des refus de prime et d’évolution de carrière".

Pour illustrer ces propos, elle a rappelé les résultats de l’enquête bisannuelle de L’Autre Cercle avec Ifop de 2022 qui montraient qu’une personne sur trois avait subi une discrimination ou une agression sur son lieu de travail, contre une sur quatre en 2020. Concernant la visibilité, moins de la moitié s’est déclarée l’être. Après cette introduction, Catherine Tripon a posé deux questions aux trois invités de cette table ronde : "Pourquoi on se cache ? Et pourquoi on décide d’en sortir ?".

© AP / Boris Stoykov. - Nadim Bel Lallahom, Catherine Tripon, Corinne Calendini et Olivier Draeger.

Se cacher "pour éviter le rejet"

Le premier à répondre a été Olivier Draeger, président de Draeger, une maison de création de cadeaux et accessoires de mode. Pour lui, ce sujet est "intime et personnel", il n’est donc "pas encorespontané d’en parler" :

Personnellement, il m’a fallu du temps pour accepter et comprendre que j’étais différent, et vivre ainsi. Après ces plusieurs années d’acceptation, j’ai pris le temps pour le partager avec des proches, puis de façon professionnelle et finalement avec vous aujourd’hui.

Au-delà de l’acceptation de soi, Olivier Draeger a ajouté une autre raison, qui l’a poussé à se cacher :

Quand j’ai commencé à partager mon homosexualité avec des proches, ils ont été bienveillants, mais ne savaient pas forcément comment réagir, et se comporter. Cela amène des situations inconfortables. Donc la façon de se sortir de là, c’est de ne pas aller plus loin, de ne pas le partager avec davantage de monde et de rester dans la confidentialité.

Une réalité partagée par Nadim Bel Lallahom, président de Diversidays, une association qui traite de toutes les discriminations. "Nous nous cachons pour éviter le rejet. Personnellement, j’ai vécu des rejets au sein de ma famille, dans le milieu scolaire, donc je n’avais pas envie de revivre une situation de rejet au sein de l’entreprise", a-t-il avoué.

Pour sortir du silence, Olivier Draeger a eu un déclic lors d’une discussion avec un anglais, qui lui a indiqué "Oui, et alors ?". Trois mois qui ont tourné dans sa tête et l’ont "libérés". "Ils m’ont permis de comprendre que finalement, c’était un sujet pour moi, éventuellement pour mes proches, mais que finalement pour le reste du monde, ce ne devait pas être un sujet". Dirigeant d’une entreprise, il a alors décidé d’en parler à ses collaborateurs et pris "le risque d’être rejeté".

De son côté, Nadim Bel Lallahom a évoqué une révélation forcée, lorsqu’il travaillait au ministère des Affaires étrangères, il y a un an. "Je me suis rendu compte que je pouvais être discriminé en entreprise, lors d’une pause-café avec des collègues de mon équipe. Dans la discussion, l’un d’eux a dit « Les homos et les trans, s’ils ne voulaient pas être discriminés, ils n’avaient qu’à ne pas l’être ». A ce moment-là, j’ai été au vu de mes engagements et de ma personnalité, un peu forcé à un coming-out dans un ministère où je venais d’arriver", a-t-il révélé. Le président de Diversidays a poursuivi :

Du coup je leur ai dit : « Moi je suis homo et je ne l’avais pas choisi au départ », ce à quoi ils m’ont rétorqué « c’est votre vie privée ».

"Créer un safe place pour que les gens aient le droit d’être eux-mêmes"

Une autre invitée à témoigner, Corinne Calendini, directrice générale d’Axa épargne retraite et prévoyance individuelle et membre du comité exécutif d'Axa France, a une histoire différente des deux autres intervenants. Elle était jusqu’il y a trois ans, dans ce qu’elle a appelé "l’hétéronormative la plus totale", mariée à un homme et mère de deux enfants.

Mais à presque 50 ans, Corinne Calendini est tombée amoureuse d’une femme. Elle s’est alors dit : "ça va être facile", puisqu’elle était coprésidente du réseau Mix’iN chez Axa, qui promeut "l’inclusion, l’égalité, le droit d’être soi-même et la mixité". Toutefois, la réalité n’a pas été aussi simple. "Tout le monde a la machine à café parle de son week-end, mais aussi lors de réunion, et donc très vite vous êtes en train de devoir faire votre coming-out", a-t-elle imagé. "Or la première fois que j’ai voulu le faire, pleine de courage, je n’y suis pas arrivée, parce que j’ai eu peur".

Quand j’ai réussi à le faire, c’était un moment de vérité pour moi. Je n’ai pas parlé de ma vie privée, mais des peurs pour faire comprendre aux gens que c’est un sujet. Il est important en tant que chef d’entreprise, en tant que leader, de créer une safe place pour que les gens aient le droit d’être eux-mêmes. Ils ont le droit d’en parler ou pas, c’est un choix personnel.


- Corinne Calendini

Elle a d’ailleurs affirmé : "C’est toujours un effort aujourd’hui d’en parler, parce qu’au fond, on se dévoile un petit peu, mais pas vraiment. Nous essayons juste de dire « J’ai le droit, comme tout le monde, de parler de moi si j’en ai envie »".

"Quand on fait son coming-out en entreprise, il y a des risques : perdre la confiance de ses équipes, ou encore subir des discriminations. Puis, quand vous êtes une femme, il y a le risque de devoir vous battre désormais contre le sexisme et contre l’homophobie", a ajouté la directrice générale d’Axa épargne retraite et prévoyance individuelle, invitant le public à une certaine réflexion.

Partager :
Abonnez-vous
  • Abonnement intégral papier + numérique

  • Nos suppléments et numéros spéciaux

  • Accès illimité à nos services

S'abonner
Journal du 21 avril 2023

Journal du21 avril 2023

Journal du 14 avril 2023

Journal du14 avril 2023

Journal du 07 avril 2023

Journal du07 avril 2023

Journal du 31 mars 2023

Journal du31 mars 2023

S'abonner
Envoyer à un ami
Connexion
Mot de passe oublié ?